Français

Hier et Aujourd’hui

Traduction: Edouard Philippe

Pussy Riot, Igor Mukhin

Un Souvenir

Joanne Leedom-Ackerman

Le Comité des femmes écrivains a été conçu en janvier 1986, au Congrès du PEN International à New York, il y a vingt ans, mais il n’est officiellement devenu un Comité permanent du PEN International que jusqu’en 1991.

Voici mon souvenir de ma propre participation. J’étais au Congrès en tant que membre du centre PEN de Los Angeles (actuellement PEN USA) ; Nous avions été enregistrées ainsi que les délégués étrangers. J’étais assez nouveau membre du PEN et je ne connaissais que très peu d’écrivains. J’ai assisté à plusieurs panels et je suis devenue de plus en plus mal à l’aise parce que les intervenants étaient presque tous des hommes. J’ai mentionné cela à un amie éditeur qui n’assistait pas au Congrès, et elle me dit: “Tu devrais intervenir.” J’ai pensé: “Oui, surement, je vais vraiment le faire, dire quelque chose en face de tous ces écrivains!”

Le lendemain, j’étais assise dans la salle de bal de l’hôtel pleine de chandeliers, sur le point d’écouter encore un autre groupe complètement masculin, et j’ai murmuré à la personne à côté de moi, “Où sont les femmes?” Mon souvenir, c’est que j’étais assise derrière Toni Morrison, qui a dit: “Vous devriez dire quelque chose.” Ce souvenir est-il vrai? Toni Morrison, l’un des écrivains que j’admire grandement, m’a-t-elle vraiment dit de dire quelque chose? Il est possible que ma mémoire ait embelli ce souvenir, mais ce qui n’est pas embelli, c’est que j’ai dit quelque chose, invitée par la déclaration suivante de l’un des présentateurs. “Depuis le XIXe siècle, la rationalité a été le seul critère de citoyenneté aux États-Unis.” Il a ensuite continué la discussion qui concernait le colloque. Le thème du Congrès était “L’Imagination des Ecrivains et l’Imagination de l’Etat,” un sujet controversé car beaucoup d’auteurs ont fait valoir que l’Etat n’avait pas d’imagination.

Durant la période de questions et réponses, je me suis levée et j’ai dit quelque chose comme, “Je vous fais remarquer qu’au XIXe siècle, la rationalité n’a été le seul critère de citoyenneté que si vous étiez blanc et masculin… mais ce qui me tracasse aussi dans ce congrès c’est l’absence de femmes dans les groupes de discussion. Où sont les femmes écrivains?”

Puis je me suis assise. Une pensée m’est venue à l’esprit, “Je ne peux pas croire que tu viens de faire cela. Eh bien, au moins tu as dit ce qui te préoccupait.” Je ne me rendais pas compte que cette préoccupation était partagée par beaucoup d’autres femmes assistant à ce Congrès, et qu’une fois la question posée, les écrivains femmes qui se connaissaient, y compris Grace Paley et d’autres, se mobilisèrent.

Une réunion a été convoquée. On m’a demandé, ainsi qu’a deux autres femmes écrivains, de rédiger une déclaration de protestation féminine. La seule photo du Congrès PEN sur la première page du New York Times a été celle de cette réunion de femmes. Le premier plan montrait le directeur général du PEN américain lors d’un débat avec Betty Friedan. A la table dans le fond, recueillant les déclarations des femmes étaient Meredith Tax, qui présidait la réunion et qui est elle-même l’une des fondatrices du Comité D’écrivains Femmes du PEN, une autre écrivain, Erica Duncan, et moi-même.

Norman Mailer, Président du Centre PEN Américain, a contribué à la cause des femmes, alors qu’il tentait d’expliquer l’absence de femmes au Congres. Il a dit que davantage de femmes avait été invitées mais elles n’étaient pas venues, puis il a ajouté que les organisateurs avaient voulu inviter des écrivains ET des intellectuels, et il qu’il n’y avait pas tellement de femmes intellectuelles. Que Dieu bénisse Margaret Atwood, qui a été, je me souviens, cinglante et pleine d’esprit dans sa réponse au nom des femmes.

Après cette réunion à New York, je suis retourné à Los Angeles avec beaucoup plus d’amis écrivains New-Yorkais. Quelques années plus tard, je suis devenu présidente du Centre PEN de Los Angeles, (dont le nom a changé à PEN USA Ouest) et Meredith Tax, Grace Paley et d’autres femmes se sont ralliées de divers pays autour du globe, et on entrepris d’organiser le Comité d’Ecrivains Femmes pour donner une plus grande visibilité à la voix et l’esprit des femmes écrivains endéans du PEN, dont la plupart des forums à l’époque étaient largement masculins. Cette même année un Comité d’écrivains femmes a démarré endéans du PEN américain. Nous nous sommes toutes rencontrées lors des Congrès intermédiaires, et enfin lors du Congrès PEN à Vienne en 1991, ou le Comité International des Femmes Ecrivains est né, comme membre officiel du PEN International. Premier plan : à gauche – Karen Kennerly, Directrice générale du PEN Américain, à droite – Betty Friedan. Plan de fond: (De gauche à droite) Starry Krueger, Joanne Leedom-Ackerman, Meredith Tax.


Une histoire du Comité des Femmes Ecrivains du PEN

Lucina Kathmann

L’histoire du Comité PEN International de Femmes Ecrivains (PIWWC) est en fait de nombreuses histoires. L’une d’elles est une histoire régionale, par exemple le travail du PIWWC en Afrique francophone, en Amérique latine ou en Scandinavie. Lorsque nous avons commencé à parler de nos souvenirs, beaucoup d’histoires ont émergé, reflétant les parties du monde dans lequel nous vivons, reflétant sa diversité ethnique et géographique.

Dans chaque région, les acteurs sont différents, mais les objectifs restent les mêmes : l’amélioration de la situation des femmes et surtout des femmes écrivains.

Le PIWWC est le comité le plus géographiquement diversifié des comités du PEN International. C’est également le seul Comité PEN basé en dehors de l’Europe, et, bien que très bien représenté en Europe, il a maintenu une tradition d’avoir été coordonné à partir de différentes régions.

À l’exception de très peu de projets bien spécifiques, le PIWWC n’a jamais eu de ressources financières. Il n’a pas de cotisations, ni aucune subvention du PEN International ou des différents centres PEN. Certains projets ont été financés grâce à des donations anonymes faites par des membres du Comité. Souvent la présidente elle-même ou son centre, ont, sciemment ou pas, absorbé le coût des communications pour le PIWWC. Ceci rend sa considérable activité d’autant plus remarquable.

Comme tous les autres comités du PEN International, la PIWWC se réunit chaque année lors du Congrès mondial PEN International. Les réunions sont invariablement bien fréquentées et très animées.

Dans les années qui suivirent la création de la PIWWC, le profil des femmes au sein du PEN International est devenu beaucoup plus marqué. Aucune étude formelle n’a été faite à ce sujet, mais les jours où les groupes de discussion aux Congrès mondiaux, avec 12 écrivains masculins et sans aucune femme, dont beaucoup d’entre nous se rappellent, sont de l’histoire ancienne. Toutefois, jusqu’à ce jour, il n’a pas encore eu de femme présidente du PEN International.

Le Comité des Femmes Ecrivains a vu le jour durant l’assemblée générale du PEN à Vienne en novembre 1991. Meredith Tax, du Centre PEN Américain, a servi comme sa première présidente. Le Comité a été impliqué dans de nombreux projets, dont la plupart sont en cours :

Création de Nouveaux Centres PEN:

Un certain nombre de nouveaux centres PEN ont été créés, grâce aux efforts des membres du Comité de Femmes Ecrivains, principalement à l’époque de sa création en 1991. Pendant les premières années, María Arrillaga, qui était la Présidente du PEN de Puerto Rico, a fait un certain nombre de contacts personnels qui ont conduit directement à la création de centres PEN en Amérique latine. Le Comité des Ecrivains Femmes (WWC) reste bien représenté dans les nouveaux centres et dans le développement de nouveaux centres. Meredith Tax, première présidente du WWC a observé que la participation active des femmes dans un centre, en particulier dès le début, favorise la stabilité du Centre.

L’inclusion de la Langue Espagnole:

Le WWC a été très actif dans la promotion de la campagne pour l’acceptation de l’Espagnol comme l’une des langues officielles du PEN, une décision qui a été finalement acceptée par l’Assemblée générale du PEN en 1996.

Le WWC continue à soutenir la diversité. Souvent les femmes parlent à travers d’interprètes dans les réunions du Comité, ce qui permet, pour la première fois, la participation des ces déléguées. Le WWC a permis d’instaurer la confiance en ces déléguées, ainsi qu’en d’autres, dont les voix ont plus tard été écoutées dans d’autres comités et dans l’Assemblée Générale.

Participation à l’ONU:

En 1995, Greta Rana, qui était présidente à l’époque, a dirigé une délégation de femmes écrivains à Beijing, pour assister à la 4e Conférence mondiale de l’ONU sur les femmes. Cela a donné au PIWWC le droit de participer aux sessions de la Commission de l’ONU sur la condition de la femme à New York en février/mars de chaque année. Tsung Su, membre du PEN des Ecrivains Chinois à L’étranger, et Lucina Kathmann, du PEN de San Miguel, y ont assisté depuis lors.

Foire du Livre de Francfort :

En 1993, le Comité des Femmes Ecrivains a parrainé un “Atelier D’édition Sud-Nord” à la Foire du livre de Francfort, avec l’intention de connecter les femmes écrivains du Sud avec les éditeurs du Nord.

Bulletin D’information Trilingue:

Chaque année avant le Congrès du PEN, de l’automne 1993 à l’été 2003, Network/Le Réseau/La Red, le bulletin trilingue du Comité des Femmes Ecrivains est apparu comme un magazine sur papier tabloïd, édité par Lucina Kathmann, photocomposé par Charles Kuschinski et puis, après sa mort, par Lucina Kathmann. Il a été imprimé par le bureau du journal Correo à Guanajuato (Mexique) et envoyé par la poste à tous les représentants du WWC dans le monde entier, puis il a été distribué au Congrès PEN et dans la salle durant les sessions de la Commission de la Condition Féminine à l’ONU à New York.

Ce bulletin incluait les rapports sur les activités des femmes écrivains dans divers centres et une lettre de la Présidente. Il contenait aussi des extraits d’ouvrages de femmes écrivains dont le travail a mis en évidence certains problèmes du Comité. Certaines de ces écrivains étaient déjà célèbres, tels que Rosa Montero (Network Vol 2, 1994) , Mariet Meester (Vol.11, 2003) et certaines sont devenues célèbres bientôt après, tel que Doris Pilkington Garimara, qui a écrit Follow the Rabbit-Proof Fence l’année d’après la parution d’un extrait de son premier roman dans Network Vol 4, 1996.

Ce bulletin contenait également des textes de femmes qui avaient été emprisonnées ou menacées à cause de leurs écrits, comme María Elena Cruz Varela, Helen Mack (au nom de sa soeur Myrna, assassinée), Taslima Nasrin, Flora Brovina, Asiye Gúsel Zeybek. Il contenait également les rapports annuels que Tsung Su et Lucina Kathmann avaient rédigé sur les sessions de la Commission de la Condition Féminine à l’Organisation des Nations Unies à New York.

Quand Judith Buckrich a été élue Présidente de la PIWWC en 2003, ce bulletin a commencé à être produit en Australie. Il a été publié dans trois langues deux ou trois fois par an jusqu’en 2009. Au début, il été disponible en version imprimée, mais ensuite, une fois que l’internet est devenu presque universel, il a été disponible en ligne uniquement.

Conférences Régionales et Livres Publiés à la Suite de Conférences:

1995, Conférence des Ecrivains Femmes Latino- Américaines: Censura y Autocensura, Août 1995, organisée par Martha Cerda. Les mémoires de cette conférence qui eut lieu à Guadalajara ont été publiés par le Centre PEN de Guadalajara.

1996, Atelier sur les Obstacles aux Femmes Ecrivains en Asie du Sud, qui eut lieu à Bhaktapur, Népal, en août 1996 (organisé par Greta Rana). Les mémoires de cette réunion ont été publiés par le Centre PEN du Népal en édition bilingue.

1998, Seconde Conférence des Ecrivains Femmes Latino- Américaines: Censura y Autocensura, organisée par Martha Cerda, qui eut lieu à Guadalajara en décembre 1998. Trois volumes d’articles de cette conférence ont été publiés en espagnol sous le titre Libertad Condicional et un volume en anglais a été publié sous le titre Conditional Liberty, par la maison d’édition La Luciérnaga Press, de Guadalajara, en l’an 2000.

2001, Première Conférence Ibéro-Américaine des Editeurs Alternatifs, Guadalajara, organisée par Martha Cerda. Plus de 70 éditeurs, traducteurs et écrivains de sept pays y ont assisté. Les mémoires ont été publiés sous le titre La Bibliothèque de Babel par le Secrétaire de la Culture de l’état de Jalisco et l’école d’écrivains SOGEM.

2005, Bichkek, Kirghizistan. Cette conférence, qui s’est tenue immédiatement après le Congrès mondial PEN International à Bled, a inauguré une série de conférences afin de renforcer la participation de l’Asie centrale au PEN. Organisée par Vera Tokombaeva (Iverson) et Judith Buckrich.

2007, Finlande. Une conférence de suivi pour les femmes écrivains de l’Asie centrale a été organisée par le Comite PEN des femmes écrivains finlandaises sous la direction de Rita Dahl. Deux publications en ont résulté : Kyltymätön uuni – Le Four Insatiable, 2007, publié en Finlande et le Rossignol en Cage, 2008, publié au Kirghizistan.

2007, Dakar, Sénégal. Cette conférence s’est tenue immédiatement après le Congrès mondial PEN International à Dakar. Parce que beaucoup de femmes étaient venues pour participer à la Conférence des Femmes Ecrivains, il y eut cette année beaucoup plus de déléguées femmes au Congrès du PEN. Les articles de cette conférence ont été publiés sur le site Web du WWC. La Conférence de Bichkek et la Conférence de Dakar ont été rendues possible par une donation anonyme.

Livres : Notre Voix

Il s’agit d’une série de quatre anthologies recueillies et imprimés à la main par Biblioteca de Textos Universitarios à Salta, en Argentine. Un avis avait été envoyé que n’importe quel auteur femme de n’importe quel centre PEN pouvait soumettre un texte, pourvu qu’il n’entre pas en conflit avec les valeurs du PEN, dans une des trois langues officielles, l’Anglais, le Français ou l’Espagnol. Les textes seraient placés directement dans le volume sans édition. Cela a été utile pour les écrivains originaires de pays ayant une industrie de l’édition faible et discriminatoire ; mais en fait il y eut des textes soumis par des écrivains de toutes les régions, y compris ceux ayant déjà publié avec succès.

Premier Volume : 2001

Deuxième Volume : 2001

Troisième Volume : 2005

Quatrième Volume : 2008 ( le quatrième volume peut être consulté en ligne par ce lien : http://tinyurl.com/nzt8lev )

Prix Littéraires:

En 2003, le WWC a donné un prix littéraire, appelé Prix Littéraire de Amy de Dawson-Scott. Ce prix a été remis en deux catégories, littérature écrite en Anglais, remporté par Elspeth Sandys de la Nouvelle Zélande et en Espagnol, remporté par Nuria Blanchard. Ces prix ont été remis en un événement dans un endroit très dramatique, sur le toit du château de Chapultepec dans la ville de Mexico.

Section Diversité du Site Web:

Après le Congrès de PEN à Belgrade en 2011, une section spéciale du site Web du Comité de la Traduction et des Droits Linguistiques, dénommée Diversity, a été ouverte pour les écrivains du PIWWC, pour que celles-ci se rapprochent à travers leurs oeuvres (Coordination de Marija Simokovic).

Cas de Droits de L’homme:

Le nombre de femmes écrivains au nom duquel le WWC a écrit des lettres chiffre sans doute dans les milliers. Lorsque le Comité a été créé, son premier cas a été Nawal al Saadawi. Le gouvernement égyptien avait simplement confisqué les actifs de son ONG pro-femmes et interdit la publication de son bulletin, Noun. Depuis sa création le WWC a écrit des appels en faveur de tous les cas d’emprisonnement, de menace, de meurtre ou autre provocation qui lui ont été soumis.

Présidentes du Comité :
Meredith Tax 1991-1994
Greta Rana 1994-1996
Lucina Kathmann 1996-2000
Martha Cerda 2000-2003
Judith Buckrich 2003-2009
Kadija George 2009-2011
(En 2011-2012 le Comité a fonctionné sans Présidente)
Ekbal Baraka 2012- maintenant.

Merci à :
Elizabeth Nordgren, Judith Buckrich, Greta Rana, Martha Cerda et Rita Dahl pour leur aide dans la préparation de ce texte.
Traduction: Edouard Philippe

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